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(Partie
deux)
La statue de « Sésostris III » de la collection
François Pinault : itinéraire d’un faux
|
Par Luc Watrin (01/2006) |
L’étude de la statuaire royale du Moyen-Empire, dont
l’âge d’or se situe sous les règnes du roi SESOSTRIS
III et de son fils AMENEMHAT III (vers 1900-1800
avant J.-C.), révèle des chefs-d’œuvre de sculpture
naturaliste dont les essais de Dietrich Wildung,
spécialiste incontesté de la période en Europe,
donnent un rapide aperçu (e. g. Wildung, 1984, Le
Moyen-Empire). Très complexe et difficilement
imitable, la statuaire de cette période inspire
pourtant largement les faussaires. La tentative de
tromperie à l’aide d’objets truqués est une fraude.
Le terme de « faux » semble le plus approprié pour
désigner ce type de fraude où le faussaire invente
et « forge de toutes pièces » ses productions. Il
faut néanmoins distinguer les copies d’objets qui
sont fabriquées pour les touristes et celles, à
prétention antique, qui sont destinées à berner les
esprits avertis, vendues parfois à prix d’or à de
riches collectionneurs ou musées publics.
L’histoire des faux objets antiques égyptiens montre
que des marchands d’art peu scrupuleux collaborent
avec quelques égyptologues institutionnels
indélicats, légitimant, par leurs dires et leurs
écrits, ces forgeries. Quel meilleur argument en
effet, pour rassurer un acheteur, que de lui exhiber
« un certificat de garantie » signé par un
égyptologue rattaché à un grand musée public ou une
université d’Etat !
Pourtant, nous pensons que tout objet issu du
marché de l’art doit être à chaque fois
scientifiquement testée. La confrontation avec des
objets provenant de fouilles officielles, l’analyse
stylistique et l’étude des matériaux menées de
manière professionnelle laissent normalement peu de
chances aux faux.
Pourtant, deux exemples récents, la statue du roi
SESOSTRIS III aujourd’hui dans la collection
François Pinault et celle du roi AMENEMHAT IV de la
collection Théodore Halkédis (fig. 1), qui ont coûté la
bagatelle de près d’un million de dollars à leurs
propriétaires respectifs, sont considérés à ce jour
comme des antiquités de grande valeur. Leur
existence même représente une infamie pour la
connaissance égyptologique et déroute le jeune
chercheur ou le passionné qui prend souvent pour une
vérité révélée ce qui est publié dans les livres.
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Fig. 1a
: Buste d'un vrai Sésostris III, Le Caire. |
Fig. 1b : Buste d'un vrai
Amenemhat III, le Caire.
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Fig 1c :
Buste du faux Sésostris III. |
Fig 1d : Buste du faux
Amenemhat IV.
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Mécénat et statuaire égyptienne :
la statue du roi SESOSTRIS III
achetée à Paris à l'Hôtel Drouot en 1998 et les expertises
contradictoires |
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En 1997, monsieur François Pinault est
sollicité par les « Amis du Louvre » pour
l’acquisition d’une statue de reine du
Moyen-Empire disponible sur le marché de
l’art européen. Il s’agit d’une effigie en
pierre au nom de la reine Ouret, mère du roi
Sésostris III, une authentique statue
égyptienne, aujourd’hui propriété du Musée
du Louvre grâce à la contribution du
généreux mécène (Fig 2). En 1998 une
nouvelle statue en pierre, cette fois au nom
du roi Sésostris III fait son apparition sur
le marché parisien. Madame Elisabeth Delange,
conservateur au Musée du Louvre délivre
alors avant la vente une expertise favorable
de cette pièce à madame Pinault intéressée
par son acquisition. L’objet est acquis aux
enchères le 10 Novembre 1998 pour une somme
de cinq millions de francs. Alerté après la
vente par un article de Vincent Noce
dans Libération, relayant
l'avis du |
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Fig. 2 : Cliché de la reine
Khénémet-néfer-hedjet-ouret. |
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Professeur allemand Dietrich Wildung que
cette statue est suspecte, monsieur
Pinault refuse d’honorer son achat déclenchant le
début de ce qu’il est convenu d’appeler «l’affaire
du Sésostris III ».
Une
expertise judiciaire réalisée par Mmes Christiane
Desroches-Noblecourt et Elisabeth Delange en mars
2000 conclut que la sculpture du pharaon assis au
nom de Sésostris III, aujourd’hui propriété de Madame Pinault
« dénote un savoir-faire égyptien et une bonne
qualité de la statue entière, sans erreur
structurelle […] signant sans ambiguïté un procédé
d’artisan pharaonique antique». Comme cette
statue se distingue des autres effigies connues, les
experts avancent la théorie inédite d’une « statue
posthume du roi » réalisée « 60 ans après la
mort de Sésostris III à la fin de la XIIe ou
au début de la XIIIe dynastie ».
La
statue, selon notre contre-expertise réalisée
en février 2002, est un faux. Une
analyse en laboratoire confirmera plus tard cette
contre-expertise (juillet 2002. Fig. 3).
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Fig. 3a : Luc Watrin et
Bertrand Dubosc en laboratoire.
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Fig. 3b
: M. Watrin étudiant le faux Sésostris III. |
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Rien de ce qu’on est en droit d’attendre d’une
effigie royale de la XIIe dynastie n’est ici
présent. Cette statue haute de 56,5 cm, représente
un roi assis, les avant-bras posés sur les cuisses,
la main gauche posée à plat et la main droite fermée
également posée à plat tenant un linge. Elle est
réalisée dans un granit moucheté originaire
d’Assouan. L’étude de la statuaire de la XIIe
dynastie montre cependant que cette pierre n’a
jamais été utilisée pour les portraits royaux par
les sculpteurs du Moyen-Empire, qui lui préféraient
des pierres plus nobles (Fig 4). |
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Fig. 4 : Statue du faux
Sésostris III.
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Fig. 5 : Cartouche au nom du
roi sur le ceinturon. |
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Le
nom du roi est inscrit sur le ceinturon (Fig. 5). Des
photographies prises à Berlin en 1981 témoignent que
cette statue portait primitivement des textes sur le
socle (Fig. 6). Il s’agissait d’une reproduction de
la titulature du roi. Ces textes, malhabiles, avec
parfois des signes à l’envers (les deux premiers
signes du nom personnel du roi) sont défectueux
(Fig. 8).
Après avoir été refusée par le Musée de Berlin qui
concluait à la non-authenticité des textes, ceux-ci
ont été effacés, comme on peut le voir sur un cliché
pris à Genève en 1983 (Fig. 7). Lors de la vente de
cette statue, le marchand-expert (M. Chakib Slitine)
précisait qu’il pouvait s’agir d’une « surcharge
moderne sur une sculpture antique », s’appuyant sur
un avis de monsieur Jean Yoyotte qui lui avait
signalé quelques cas d’espèces.
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Fig. 6 : Cliché de 1981
(Musée de Berlin). Les
inscriptions sont parfaitement visibles. |
Fig. 7: Cliché de 1983 (Musée
de Genève). Les inscriptions ont disparues.
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Fig. 8a: Détail de la base
droite du socle. Voir le signe Ouser
inscrit à l'envers dans le cartouche. |
Fig. 8b: Détail du montant
gauche du trône. Voir le signe Ka,
unique en son genre dans la paléographie
égyptienne.
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L’attribution à
Sésostris III repose exclusivement sur le
cartouche gravé sur la ceinture. Or celui-ci est
défectueux (les signes des bras levés prétendant
constituer le nom de couronnement du roi ont une
base ronde et non pas rectangulaire). Une étude
attentive de la sculpture des hiéroglyphes sur la
ceinture montre qu’ils sont identiques à ceux
figurant à l’origine sur le socle. Contrairement à
ce qui est avancé, les textes effacés appartiennent
bien à l’état initial de la statue et n’ont pas été
rajoutés secondairement pour l’enrichir. L’ensemble
des textes étant défectueux, plus rien dès lors ne
rattache cette statue au règne de
Sésostris III. Mmes Desroches-Noblecourt et
Delange regrettent leur effacement car elles pensent
que ces textes étaient authentiques.
L’étude des principaux caractères stylistiques de la
statue nous amène aussi à conclure à un faux :
-La
statue représente un roi assis sur un trône cubique
avec un dossier bas. A la différence des trônes du
Moyen-Empire qui sont hauts et étroits, celui-ci est
bas et large, comme inspiré de ceux de l’Ancien-Empire.
Or, il est d’usage au Moyen-Empire de représenter un
trône qui ne dépasse pas la largeur maximale du
corps et des bras.
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Fig. 9a : Pilier dorsal a
sommet trapézoïdal d'un vrai Sésostris III,
Louvre. |
Fig. 9b : Pilier dorsal au
sommet carré du faux
Sésostris III.
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-Un second gros défaut réside dans la forme
du pilier dorsal. Celui-ci est haut et droit
de la base au sommet (pointe rectangulaire).
Or à la XIIe dynastie, les piliers dorsaux
des rois sont bas, larges à la base et
s’amincissent au sommet (pointe
trapézoïdale). Ce critère à lui seul permet
de conclure que la statue ne date pas de
l’époque de
Sésostris III et que le faussaire
s’est inspiré de sculptures postérieures à
la XIIe dynastie (Fig. 9).
-Une
troisième anomalie de la sculpture réside
dans sa tête. Elle est proportionnellement
trop grosse par rapport au reste du corps
comme l’avait déjà souligné le Professeur D. Wildung. Il existe bien quelques cas de
têtes disproportionnées dans la
représentation royale égyptienne, le
meilleur exemple étant la tête du roi
Mykérinos conservée au Musée de Boston, en
l’espèce trop petite par rapport aux épaules
et au reste du corps. Il s’agit d’un cas
unique (Boston 09.204). Cependant son
contexte de découverte et de restauration
(tête retrouvée à part dans les débris du
temple de Mykérinos et restituée sur l’une
des statues monumentale du roi) rend le
remontage proposé suspect, permettant
d’expliquer l’anomalie. Dans le cas du
Sésostris III, les traits du pharaon ne
ressemblent en rien à ceux de Sésostris III que
l’on reconnaît parfaitement sur toutes les statues
du même roi. L’expression du visage est lourde et
vulgaire à l’inverse des portraits de Sésostris III
qui révèlent une expression dure et dédaigneuse,
mais toujours noble. Les yeux sont étrangement vides
d’expression. Les oreilles sont presque
proportionnelles, pas assez décollées et placées
trop hauts.
- Une quatrième incohérence est la forme
des attaches au niveau du némès (Fig. 10). Celles-ci sont de
forme rectangulaire à droite et arrondie à gauche.
La statue présente donc une attache de forme droite
(qui est la norme au Moyen-Empire) et une attache de
forme ronde que l’on trouve par exemple sur des
portraits tardifs comme ceux de Taharqa (XXVe
dynastie). On imagine difficilement un artiste de la
XIIe dynastie faire une telle erreur de style !
Enfin le visage est incroyablement moderne et
pourrait éventuellement correspondre à celui d’un
empereur romain mais en aucun cas à un roi du
Moyen-Empire. |
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Fig. 10a : Profil gauche au
Némès arrondie. |
Fig. 10b : Profil droite au
Némès rectangulaire.
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Une cinquième anomalie par rapport aux statues
issues de fouilles du roi est visible : c’est le
collier du cou avec pendentif de coquillages, que
l’on trouve traité en méplat (sculpté en relief) sur
tous les portraits de
Sésostris III alors qu’il est ici réalisé en
creux (incisé) (Fig. 11).
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Fig. 11a : Collier en relief
d'une statue de Sésostris I (Le Caire).
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Fig. 11b : Collier incisé du
faux Sésostris III. |
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Le modèle de la statue litigieuse
se trouve t-il aux USA ?
Il existe aux USA deux effigies du roi Sésostris III
représenté assis et de petites dimensions (environ
55cm) . Ces deux statues, en granit noir, sont
conservées au Walter Art Museum de Baltimore et au
Brooklyn Museum de New-York (on ignore leur contexte
archéologique mais d'après les textes gravés sur le
socle elles seraient originaires des oasis de
l'Ouest et de Hiérakonpolis au sud du Fayoum). Elles
pourraient avoir inspirés les faussaires; elles sont
de même taille, la représentation est similaire,
mais la facture est très supérieure et une simple
comparaison entre la statue du Brooklyn Museum et la
statue litigieuse s'avère sans appel pour celle-ci.
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Fig. 12a. Vue de dos de la
statue de Brooklyn (notons le pilier
trapézoïdal).
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Fig. 12b. Vue de face de
la statue de Brooklyn (notons la finesse des
textes). |
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La saga juridique et la position
étrange des égyptologues institutionnels français
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Depuis plus de 20 ans, cette statue fait couler de
l’encre car elle a beaucoup voyagé d’Egypte en
Suisse, puis en Allemagne et aux USA avant de
trouver acquéreur en France en 1998. Aux Etats-Unis,
il semble que seule Madame Edna Russmann du Musée de
Brooklyn ait cru en son authenticité se démarquant
ainsi de ses confrères. En Allemagne, le Professeur
Hans Wolfgang
Müller du Musée de Berlin y croyait,
ajoutant dans un avis écrit donné en 1983 que
« Finalement, ce qui compte c’est que la statue
plaît à l’acheteur ».
.
En Belgique, Claude Vandersleyen, au début 2002, se
prononce pour l’authenticité de la statue sans aucun
argument autre que sa profonde conviction.
C’est dans la patrie de Champollion que cet objet
trouve le plus de sympathisants. Mmes
Desroches-Noblecourt et Delange (cette dernière
avait, avant la vente, donné un avis favorable sur
la statue concluant de ce fait à son authenticité)
affirment dans une démonstration à prétention
scientifique que la statue est non seulement bien
authentique mais, qui plus est, un chef-d’œuvre
unique puisqu’il s’agirait d’une « statue posthume »
(réalisée plus de 60 ans après le règne de SESOSTRIS III)
donc, en ce sens, plus rare que les autres statues
habituellement réalisées du vivant des rois.
Le
Professeur Jean Yoyotte se présente dans un premier
temps, dès 1998, comme « non-compétent » en la
matière, suggérant avant la vente
au marchand-expert Chakib Slitine, de
s’adresser directement au Professeur Dietrich
Wildung, spécialiste de la période, alors
conservateur au Musée de Munich. Celui-ci, après une
analyse de la pièce à Paris, délivra immédiatement
une expertise négative qui n’empêcha pas le vendeur
de mettre la pièce aux enchères le 10 Novembre 1998
(vente Olivier Coutau-Bégarie, expert M. Chakib
Slitine, lot 120). Le professeur D. Wildung, fort
surpris de ne pas avoir été entendu, publia plus
tard dans la presse allemande son avis sur la pièce
(Bild Berlin Brandenburg, 14/09/1999). Sa position
fut ignorée en France ou réfutée. Au premier rang,
on retrouve discrètement le professeur J. Yoyotte
qui déclare alors à Monsieur Chakib Slitine, « [que]
Wildung fait un caprice de vieux ».
Mme
Desroches-Noblecourt a pour sa part répondu aux
mises en doute de son expertise par des attaques
diffamatoires visant les personnes en désaccord avec
elle sur un plan scientifique, contre Monsieur D.
Wildung lors du premier procès et contre moi-même
lors du second procès.
Le
Professeur Jean Leclant (Secrétaire Perpétuel à
l’Académie des Sciences et Belles-Lettres) sollicité
sur le sujet par Maître Gauzères, premier avocat du
couple Pinault, a déclaré qu’il ne pouvait se
prononcer sur une statue supposée être de la XIIe
dynastie puisqu’il était spécialiste de la période
« éthiopienne » (XXVe dynastie). L’avocat de
François Pinault, en l’absence de soutien en France
plaida donc, lors du premier procès,
dans le sens de l’authenticité de la statue.
Il ignora l’expertise négative du professeur Wildung
tout comme celle d’un célèbre marchand suisse, dont
les avis étaient pourtant fortement argumentés et
figuraient au dossier. Sur instruction de ses
commanditaires, il se rangea à l’avis unanime des
égyptologues français qui déclaraient alors la
statue authentique. Maître Gauzères, plaida
« l’erreur sur la substance », la statue achetée ne
correspondant pas à celle décrite dans le catalogue
(pièce contemporaine du roi Sésostris III) mais à
une réalisation légèrement postérieure (hypothèse
retenue par les experts nommés par le tribunal, Mmes
Desroches-Noblecourt et Delange). Le tribunal ne
suivit pas cette stratégie juridique et débouta
Monsieur et Madame Pinault lors du premier procès
(arrêt du 01 février 2001),
alléguant que la pièce était bien « authentique » et
que ce point primait dans le débat. Lors du
dîner de "victoire" organisé à Paris par Chakib
Slitine suivant cet arrêt de la Cour, le Professeur
Jean Yoyotte, interrogé sur la nature de cette
statue, confirma son authenticité à l'assistance.
Lors du second procès (phase d’Appel), une
contre-expertise me fut confiée, quelques mois
seulement avant les échéances juridiques. Une
analyse stylistique, argumentée concluant au faux
grossier a donc été produite (Luc Watrin, 11 février
2002, Rapport d’étude sur le Sésostris III vendu à
Drouot le 10 Novembre 1998, 2 volumes, 342
pages)Cette expertise était soutenue par l’avis
écrit d’une vingtaine d’égyptologues étrangers de
grande renommée scientifique dont nous avons
sollicité l’avis à la fin de l’année 2001 ou au
début 2002. Ces spécialistes sont principalement
anglais et américains mais aussi italiens, belges,
autrichiens, danois, suédois, serbes, uruguayens,
israéliens et égyptiens. Parmi eux, John Baines
(Oxford), Marcel Maree (British Museum), Vivian
Davies (British Museum), Jeffrey Spencer (British
Museum), Martin Foley (Université de Bangor, UK),
Jack Josephson (conseiller culturel pour
l’administration Bush), Robert Bianchi (ancien
conservateur au Brooklyn Museum), Donald Redford
(Université de Pennsylvanie), David Lorton
(Université de Baltimore), Jennifer Hellum
(Université de Toronto), Claude Obsomer (Université
de Louvain), Helmut Satzinger (Directeur du Musée
égyptien de Vienne), Silvio Curto (Académie des
Sciences de Turin), Francesco Raffaele (Université
de Naples), Kim Ryholt (Université de Copenhague),
Leif Andreasson (Université de Göteborg), Branislav
Andelkovic (Université de Belgrade), Baruch Brandl
(directeur à l’IES), Juan Castillos (directeur de
l’école d’Egyptologie de l’Uruguay) et Mamduh
el-Damaty (directeur du Musée du Caire. Fig. 13). Les
services de Zahi Hawass, informés de l’affaire,
répondirent que « si la statue était antique,
leur directeur l’aurait réclamée ».
|
 |
Une nouvelle fois, l’ensemble des
égyptologues français qui se prononcèrent
lors de cette deuxième phase de procès
déclarèrent la statue authentique tout en
engageant des manœuvres de déstabilisation
sur ma personne, mettant un terme temporaire
à leurs querelles internes.
Monsieur Nicolas Grimal (professeur au
Collège de France) déclara à la presse :
« la pièce est bonne et Madame Noblecourt
une grande experte » (JdA 161, décembre
2002) et donna l’instruction de m’interdire
l’accès à la bibliothèque du Cabinet d’Egyptologie
du Collège de France au motif que « Luc
Watrin avait déclaré que la statue de
Sésostris III était fausse ». Madame
Geneviève Pierrat (conservateur au Musée du
Louvre) déclara pour sa
part à la fin |
Fig. 13 : Mamduh el-Damaty,
directeur du Musée du Caire, devant une vraie
statue de Sésostris III.
|
d’une conférence consacrée aux faux objets
égyptiens des collections du |
|
Louvre que la statue de Sésostris III était
authentique, thèse reposant encore une fois
uniquement sur la position académique de son
énonciateur plutôt que sur une argumentation
scientifique. Monsieur Jean Yoyotte (professeur au
Collège de France) fit pression avec insistance et
sans succès sur mon directeur de recherches
(alors directeur de l’IFAPO à Damas) pour que
j’arrête immédiatement mes investigations sur cette
statue.
Madame Desroches-Noblecourt fit elle aussi
pression en écrivant une lettre diffamante au
responsable des missions étrangères au sein du
Service des Antiquités d’Egypte (SCA) afin de
dissuader ce service de nous accorder un permis de
fouille dans le Delta, avec un certain succès pour
l’instant. Beaucoup d’autres égyptologues français
refusèrent de se prononcer. Certains déclarèrent
qu’ils étaient incompétents en la matière, ou que
« dans le fond, la statue était peut-être bonne ».
D’autres comme Olivier Perdu, par ailleurs
conseiller sur le marché des antiquités, déclarèrent
ne pouvoir se prononcer par souci de « discrétion
professionnelle ». Un autre avoua qu’il ne voulait
pas se prononcer contre l’avis des élites du système
car il risquait de perdre sa rente de situation.
Seul Monsieur Jean-Claude Goyon (professeur à Lyon
II) tenta une argumentation scientifique en
présentant une nouvelle hypothèse, celle d’une
statue anépigraphe qui serait antérieure à la XIIe
dynastie, censée dater de la XIe dynastie, et que le
roi Sésostris III se serait appropriée en y gravant
son nom et titres. Selon Monsieur Goyon, cette
hypothèse expliquerait pourquoi la statue s’éloigne
ainsi considérablement du style « barbare » (définit
par D. Wildung) propre à l’époque de Sésostris III
et de son fils.
Le
nouvel avocat de Monsieur François Pinault, Maître
Philippe Combeau, sur instruction du nouveau donneur
d’ordre juridique, Monsieur Michel Friocourt, plaida
sans trop de conviction le « doute sur
l’authenticité ». Tout comme « l’erreur sur la
substance » lors du premier procès, le subtil
« doute sur l’authenticité » eut un succès juridique
nul. Une nouvelle fois,
Monsieur et Madame Pinault furent déboutés en Appel
par le Tribunal de Grande Instance de Paris. Au
cours de ce deuxième épisode judiciaire,
Madame Slitine, l’épouse du marchand-expert,
par ailleurs conservateur d’un musée national en
France, proféra en plein tribunal des menaces de
mort sur ma personne, en me conseillant de « ne plus
aller en Egypte
où je n’étais plus en sécurité »
et cela devant de nombreux témoins, en raison de ma
participation à la défense de Monsieur Pinault.
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Seconde partie : Les
preuves scientifiques |
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